SUJET : Régler son D-One

L4615 écrit: Cool
L4615 écrit:
Je vais essayer d'écrire un document avec des photos pour expliquer le réglage du gréement sur un catboat à mat souple et barre d'écoute (Europe/Finn/D-One).
En attendant voici quelques conseils (à l'arrache sur l'heure de midi) :

Clairement si tu as eu des problèmes pour passer sous la bôme c'est que tu as réglé le bateau comme un dériveur classique (y compris skiff), avec du hâle-bas au près ... donc effectivement quelques explications s'imposent.
Je vais essayer d'exposer la théorie pour que tu comprennes plutôt que de te donner des réglages tout fait.
Tu verras que sur le D-One tu vas pouvoir donner à ta GV une forme très précise adaptée à chaque type de vent/mer rencontré.
Il est donc important que tu comprennes la machine, plutôt que le traditionnel "quand çà monte, tu prends Bordure/H/B, Cunni
Le façonnage de la GV :

Comme sur tous les bateaux, tu façonnes la forme de ta GV avec :
- La bordure : Qui va principalement te donner du volume sur le 1/3 inférieur de ta GV

- La tension de chute : Plus on en prend, plus on va :
> dans un premier temps, fermer ton profil (surtout sur les 2/3 supérieur)
> puis va cintrer ton mat (énormément sur un mat carbone non haubané comme Europe/Finn/D-One).
Le cintre du mat aplati les profils de GV.
> puis va faire ouvrir le haut de la chute

- La tension de guidant : Va tirer le "tissus" vers l'avant :
> Dans un premier temps çà avance le creux maximum de la GV
> Dans un deuxième temps (surtout avec le hâle/bas pris) çà fait complètement dégueuler le haut de la voile.

LES REGLAGES : tu ajustes dans l'ordre

A> La bordure : via le réglage de bordure :
Si tu veux de la puissance dans le bas : par exemple au portant, ou au près dans le clapot
tu vas vouloir un profil creux dans le 1/3 inférieur, donc bordure relâchée.
Avantage d'un profil creux : puissance, tolérance aux variations d'incidence du vent apparent.
Inconvénient : trop puissant ? + incidence mini, plus élevée donc un peu moins de cap.

Le truc d'Idefix : Je trouve que le D-One a besoin de puissance, je navigue assez creux jusqu'à au moins 20kts. Éventuellement une exception dans la pétole, si je veux me mettre en mode "cap maxi." mais attention concentration à la barre, le profil est alors très peu tolérant.

B> La tension de chute :
Tu remarqueras que je n'ai pas parlé de Hâle/Bas, Barre d'écoute, Ecoute de GV, jusqu'ici.
En effet ces trois commandes ont potentiellement une action sur la tension de chute, mais avec des mécaniques différentes.

Le Hâle-Bas : Si l'on fait le diagramme des forces, les hâle-bas, ou pousses-bas sont de très mauvais systèmes pour contrôler la tension de chute. Le point d'application est entre 20% et 25% de la bôme (ce qui veut dire que pour appliquer 25kg de tension de chute, il faudra appliquer une force verticale de X4 ou X5, soit 100 à 125kg (je vous fais grâce des newtons).
Par ailleurs, les H/B travaillent avec un angle de 45° à 30°, donc pour 125kg de force verticale, on aura une tension T = 180 à 250kg (1/Sin(alpha)), mais également une force horizontale "parasite" sur la bôme (qui va cintrer le mat), de 125 à 220kg (T*cos(alpha)) .
Bref ... 25kg de tension de chute voulue ... 250kg de bordel !!!
Du coup on ajoute des lowers (4000), ou une cale d’étambrai (Fire, 5O5) pour compenser .... et chez certains constructeurs, ont explose les vis de mulet , on écrase les gorges de ralingue etc etc ....
Pire, quand on développe des GV à cornes en tissus composite, qui demandent de grosses tensions de chute (40-50kg), les hâle-bas deviennent monstrueux, et les bas de mat de vrais pieux (i14).

Bref, j'avais été particulièrement amusé, quand certains "expert skiffeurs" dans leur logorrhée anti-D-One s'étaient gaussés à propos de l'adoption de la barre d'écoute, sensée être un système has-been tradi. ... aujourd'hui par exemple dans le monde du cata avec les voiles de + en + puissantes, plus personne ne songe à mettre de hâle-bas qui ont disparus, au profit des chariots d'écoute, sur la poutre arrière.

La barre d'écoute :
Vu ce qui précède, (et surtout vu la géométrie du H/B sur le D-One), tu comprendras qu'on réservera le H/B à la tenue de chute de GV, exclusivement au portant.
Donc au près le Hâle-Bas est complètement choqué

La tension de chute est appliquée par le bordé d'écoute de GV.
Le palan se trouve à mi-bôme, et tire complètement verticalement, donc pour 25kg de tension de chute, on applique X2, soit 50kg de tension d'écoute, sans aucun effet parasite sur la bôme/vis de mulet.

80% de la forme de la GV est créé par le couple, écoute de GV, barre d'écoute.

Le truc d'Idefix : Il est donc totalement indispensable de graduer la barre d'écoute. (surtout que la drisse de spi désaxée, peut induire en erreur pour le centre. Une gradation à "chaque vis" est parfaite comme sur la photo ci-dessous.



Petit temps : on cherche une faible tension de chute, voile ouverte en haut pour laisser respirer, et ne pas bloquer les filets d'air avec une chute qui referme. Le chariot est presque centré (repère A sous le vent), on borde la GV juste ce qu'il faut, et on écoute le bateau glisser.
Le truc d'Idefix : Contrairement à certain gréement tradi., vu la forme de la voile, on ne met jamais la barre d'écoute au vent pour vriller la GV.

Petit-Medium : progressivement, on va pouvoir border un peu plus l'écoute de GV (chariot toujours presque centré).
La chute de GV commence à fermer, le mat cintre légèrement, ce qui créé un profil dont le creux maximum est à 30-40% de la corde.
C'est le régime de prédilection du D-One, un cap de malade, et une vitesse qui grimpe rapidement à plus de 6kts.
Si on tombe dans une molle, on relâche de l'écoute pour relancer le bateau, puis une fois reparti, on referme pour choper la puissance et caper.
Toujours faire attention à ne pas décrocher le penon supérieur de la GV

Medium : Pleine puissance, rappel maximum, la GV est très bordée, ce qui va commencer d'aplatir la voile.
Le chariot est sur les repères A ou B



Le D-One d'Agustin Zabalua au medium, le barreur est au rappel, les jambes parfaitement calées sur l'aile.
Le barreur serait cependant plus confortable avec un stick un peu plus long (rallongé de 15cm sur Idefix)
Le chariot est encore relativement centré, la chute de GV est très tendue (extrémité de la bôme en dessous de l'aile .
On note également le volume important du creux inférieur de la GV (au moins 20cm).


Sur-puissance : Dès qu'on ne tient plus le bateau, il est hors de question de choquer la GV (ce qui redresserait le mat, creuserait la voile, et donc ajouterait de la puissance). Donc il faut ouvrir tout en gardant la tension de chute.
On ouvre donc le chariot progressivement, (repères C, D), en gardant la GV bordée au max.
Avec un bon rappel, et une mer pas trop de face, on peut même planouiller (mais c'est clair que les doubles à rating équivalent vont plus vite (470, Fireball).
Dès que çà mollit, on reprend un peu de chariot pour caper ... c'est un régalge que je travaille énormément, si le vent est fort et instable.
Donc (ref. ta question) , le chariot de GV doit coulisser sous tension, et le bout de commande doit être gros (6mm) confortable, avec une bonne préhension.

Gestion de la grosse risée : Si on se prend une grosse baffe, il faut loffer. Ce n'est qu'en cas d'urgence absolue qu'on choquera la GV en grand (puisque dans un 1er temps elle va apporter plus de puissance, avant de faseyer).

Le virement de bord : La barre est super efficace, et le bateau généralement ardent, donc on entre dans le virement en douceur (comme avec 90% des bateaux).
Dès le mouvement initié, on choque la grand voile, ce qui va redresser complètement le mat et relever ainsi la bôme (je rappelle, qu'on a pas du tout de hâle-bas). Dans le petit et medium, il est possible de bien basculer, et on passe sous la bôme très très facilement (presque debout en se relevant de l'aile pour changer de bord).
C'est le moment aussi de passer le stick (par l'avant).

Le truc d'Idefix : J'ai rallongé mon stick de 15cm (ou plutôt Damis m'a rallongé mon stick ), et çà passe sans problème. Le stick long permet de bien sortir au rappel, et de s'avancer par petit temps.

Quelque soit le vent, le bateau passe le virement de bord, et ne manque jamais à virer
Une fois sur la nouvelle amure, la GV choquée, est creuse (mat droit), et a toute la puissance nécessaire pour relancer le bateau, sans le renvoyer au lof. Dans la piaule, on sortira du virement de bord, légèrement contre gité, pour sortir, et reborder progressivement la GV.

C> La tension de guindant :
Elle est délivrée par le cunningham, de façon assez traditionnelle.
On peut dire que jusqu'à 15kts, on se contente d'effacer les plis le long du guindant, et d'éviter que le creux du profil ne recule trop lorsque le mat cintre.
Par contre au dessus, le cunni est impératif pour vraiment faire dégueuler le haut de la voile.

Le truc d'Idefix : Quand le vent monte, initialement (en 2014), j'avais tendance à aplatir la bordure, et à diminuer la puissance avec une "voile tôle". Avec la voile plate, je trouve le bateau très "pointu", surtout s'il y a du clapot (grosses variations de vent relatif en tête de mat avec les mouvements de "cheval à bascule") , ou si le vent est instable en direction.
Ca décroche, le bateau, très léger, s’arrête ... bref je ne suis pas à l'aise.
Depuis un an, je garde toujours pas mal de puissance en bas (creux d'une main minimum), et affine la haut via le cintre, et beaucoup de cunni.
Hier dans 25kts ralaleux, le bateau passait bien, marchant quasiment exclusivement sur le 1/3 inférieur de la voile.

Par contre attention, (comme sur tous les bateaux), penser à choquer le cunni, avant d'abattre au portant.

D> Conclusions et divers commentaires :
Lors des raids, il peut se trouver que nous devions faire du bon plein, du largue (par exemple les dog-leg)
Il est important de garder la chute de GV tendue, pour un bon rendement, sans vautrer le bateau.
Entre le près et le largue, on garde la GV bordée, mais on ouvre tout le plan de voilure progressivement au chariot, pour faire partir le bateau au planning bien à plat. Il faut visualiser la GV comme une aile de forme constante, dont on règle l'ouverture avec la barre d'écoute.
Plus on abat, plus on peut se permettre d'avoir du creux. Progressivement la tenue de la chute va passer du couple écoute/chariot, au hâle-bas pour les angles de vent apparent au delà de 60° (quand la bôme doit sortir bien au delà de l'aile).

La quète :
Je ne suis pas encore totalement au point sur ce paramètre pourtant capital.
J'aurais besoin de sparing partner pour vraiment tester ce réglage.
Je ne sens pas un effet drastique sur le côté ardent (le bateau est toujours un peu ardent)
Il est clair qu'avec un mat trop droit le bateau va bourrer dans le clapot, au lieu de s'alléger vers un petit planning.
Disons que depuis le début, j'ai pas mal diminué ma quête (mat plus vers l'arrière) (mais j'ai aussi perdu pas mal de poids, donc çà va de pair).
voir l'article du site : Réglage de la quète
Pour débuter, je conseil de mettre le sabot de pied de mat, avec le trou vers l'avant, et de répartir les cales 50/50 devant, derrière le mat à l'étambrai. Prendre comme valeur de quête moyenne de 6m76
Dans le petit temps, on déplace une cale derrière (mat plus droit), dans le vent plus fort, on déplace une ou deux cales devant (mat vers l'arrière).

L'assiette :
Dans le petit temps (<8kts) , le bateau supporte un peu de gite, pour bien aérer la GV.
Sans l'avoir modélisé (comme je l'avais fais sur le B14), je pense que la surface mouillée doit un peu diminuer avec 10° de gite.
Pour ce qui est de l'assiette longitudinale, le D-One n'est pas une vrai torture comme certains skiffs avec le gréement très reculé.
Pour décoller le cul de l'eau, il suffit de se placer au dessus de la barre d'écoute, éventuellement un peu penché vers l'avant, en posant la main avant sur le début de la découpe du pont.

Dès les premiers souffles, on peut s’asseoir sur la jambe de l'aile, avec les pieds en appui sur la jambe de l'aile sous le vent (là ou se trouvent les taquets de réglage de la sangle de rappel).

Dès qu'il y a assez de vent pour s’asseoir sur l'aile ... on se met confortablement à l'avant de l'aile, (sauf la poulie de spi qui est dans le C...)

Au près, pas besoin de trop reculer (max juste derrière la poulie), sauf si çà enfourne.
Par contre dès qu'on abat ... on recule, et sous spi dans la piaule, il faut chercher avec les fesses, le petit renflement de l'aile.
On choque les sangles de rappel pour pouvoir reculer, et là, c'est le plaisir absolu, avec tout le bateau devant soi, très stable, juste cabré de 10° qui avionne.
Reste à créer son vent relatif, en relançant par un petit lof, dès que "pitch" de vibration de la coque carbone baisse.
Il faut le faire hurler le plus aigu possible

Voilà, beaucoup de texte hélas, mais j'essayerai de planifier une séance photo pour illustrer dans les prochains jours.

Merci Rémi, mise en pratique prévue ce soir après le boulot.

Soleil et vent au rendez vous hier soir.
J'ai donc essayé de mettre en application les conseils de Rémi pour cette deuxième sortie.

Point positif, c'est bien mieux pour le passage sous la bôme.

En ce qui concerne le cap et la vitesse, j'ai du mal à me rendre compte car seul sur l'eau et le vent varie pas mal.
Vivement le retour d'Etienne pour pouvoir m'étalonner.

PS, je vais dans le sens d'Etienne, gérer la dérive et le safran c'est pas évident à l'arrivée (et au départ).
Le safran descend tout seul. Surement, un petit travail de calage à prévoir.

Pour info. , pour plus de clarté, j'ai splitté en 2 le sujet (Gréer son D-One , et Régler son D-One).
Donc la suite de la discussion gréement, accastillage, (en particulier concernant la cassette de safran) est sur Gréer son D-One

J'ai pris quelques photos hier sur le bateau des réglages de GV. Il faut que je trace quelques lignes sur les photos et je complète le sujet dans la journée.

un petit up de ce sujet utile pour les nouveaux venus, notamment Thierry chez nous à Lyon qui a fait sa première sortie ce dimanche

Je devrai aller au club samedi APM. On pourra échanger sur le sujet.