J'ai pas mal discuté avec mon fils qui est pilote, sur le travail en équipage, et les méthodes utilisées pour promouvoir cette communication.
Hors des phases codifiées, il y a toujours dans des situations anormale, le danger d'autocensure, où l'un des membres n'ose pas s'exprimer ,par peur de dire une bêtise, ou une évidence, ou dans le cas d'un "Cockpit Autocratique" écrasé par l'expérience/compétence du commandant de bord.
C'est un des cas classique de catastrophe aérienne, exemple la pire de toute, Tenerife en 1977, 583 morts, où le commandant du vol , Jacob van Zanten, 11700 heures de vol, instructeur de tous les pilotes 747 de la KML, figure de proue de la pub de la compagnie, a décollé sans autorisation, sans que son équipage (Copi ou Ingénieur de Vol) n'ose dire quoi que ce soit.
Quand j'ai navigué avec Marcel Buffet, qui était le pape du 5O5, (double champion du monde et 7eme aux JO à Tokyo ...), sur les premières régates, je n'ai pas décroché un mot
, et c'est lui qui m'a forcé à commenter ce que je voyais. Deux ans plus tard (comme finalement je ne devais pas dire trop de c......) la communication à bord était permanente. Une leçon que j'essaye de retenir quand je navigue en équipage (le risque d'autocratie, il vient de moi
comme en témoignera Fabien
).
Même quand il n'y a pas de risque d'auto-censure, dans les méthodes suggérées, on trouve :
> d'une part, la réalisation de checklist (mentale), aux moments fondamentaux de la régate (départ, bouée, arrivée).
Réciter à voix haute ces actions quand on les réalise, permet de forcer l'expression de chacun, et le cas échéant de compléter avec des remarques pertinentes.
> Une fois ces points cruciaux mis en place, on peut initier une routine systématique de commentaires.
Toute les 2 minutes, l'équipier décrit le plan d'eau, les conditions MTO, le placement du bateau, son ressenti de l'équilibre du bateau etc ...
Le barreur à son tour, commente son ressenti, vitesse, équilibre sous barre, placement au portant etc etc ...
A effectuer, même si on est pas en régate.
On observe alors que avec l'habitude, au lieu de devenir un exercice forcé chaque mn, cette communication progressivement se déclenche avec les évènements (annonce des risées, de la pression etc etc ...).
Perso. même aujourd'hui en solitaire, je me force à commenter à voix haute la navigation, suivant un cycle qui est à peut près toujours le même, basé sur les 3 phases que je considère fondamentales :
> 10 secondes : réglage du bateau, ressenti à la barre + physique
> 10 secondes : conduite, mes penons, le passage dans le clapot, le ressenti vitesse
> 20 secondes : je regarde dehors, et je commente , le Placement tactique, placement MTO ...
etc etc etc ....
Bien sur en fonction des conditions les proportions peuvent varier, mais quand je film, je vois effectivement le regard qui observe la forme de GV, puis redescend vers les penons, et l'étrave, puis fait un long tour du plan d'eau ... pendant que je marmonne
A l'approche des marques, je me récite mes checklist (HB, Cunni, Barre d'écoute > Placement anticipation prochain bord > Ecoute, Placement > Drisse, Ecoute Spi > Relance, Placement, Point vent/cap/adversaire etc etc ...)
L'écriture de ces checklist, à terre (et la simulation) est d'ailleurs un excellent exercice de cohésion d'équipage (et permet des fois de réaliser que le barreur ne laisse pas le temps à l'équipier de faire qq-chose). Si on récite ensuite "Live" les checklist, et qu'on s’aperçoit qu'on fait qqchose, qu'on ne décrit pas, alors il faut modifier la checklist.
Mais surtout, je suis convaincu, qu'il faut se forcer à parler, même quand on se ballade à l'entrainement, et qu'il ne se passe à priori rien.
Comme çà quand il se passe vraiment qqchose, on n'hésite pas.