Gilles, ta remarques est en plein au cœur du débat que nous avons eu ces 3 derniers mois, et que j'ai essayé de rationaliser par des données factuelles, et non les impressions de parking que nous avons tous ... et qui tendent à être dans beaucoup à devenir des idées reçues ou des conclusions d'une autre époque ... non valable aujourd'hui.
Pour ce qui est de la voile légère, il y a avait autrefois un tissus de régates locales, peuplées par une population de niveaux variés.
Les meilleurs n'hésitaient pas à investir du temps et de l'argent pour avoir un bateau au top, et se déplacer sur des rassemblements monotypes de plus haut niveau qui pouvait les emmener jusqu'au JO.
Marcel Buffet, mon barreur pendant 4 années, était un pur produit de cette architecture.
Commercial dans une société qui vendait du papier carbone, (pour ceux qui se souviennent de ce que c'était), il avait négocié avec son patron, la possibilité de ne pas travailler le Vendredi, pour pouvoir partir en régate, et s’entraîner.
Il va sans dire que 100% du budget du couple (avec Huguette), passait dans la voile.
Ce régime de nav. l'a amené à être champion du monde 5O5, et sélectionné pour les JO de Tokyo avec Alain Lehoerff
Une conception obsolète hélas partagée par beaucoup d'anciens (que l'on retrouve à la fédé ou à la direction de certaines classes ... ) .
Aujourd'hui, il y a réellement deux voiles légères :
> Une voile jeune, avec un pipeline, où tu rentres en Benjamin, et qui se termine pour 96% d'entre eux avant 17ans
95% des moyens, des ligues, des commission sportives, des clubs, des entraîneurs sont alloués à ce "circus" dont la finalité sont les podium aux championnats de France Jeunes.
Sur cette masse,il en sortira quelques jeunes qui passeront en haut niveau (avec écrémage continue, jusqu'au pôle France).
Et les autre abandonnent.
Pour illustrer, cela, il suffit de regarder le classement fédéral (CNIF), en PACA par exemple, nous avions 872 jeunes classés en dériveur ... et dans la tranche d'âge 22-25ans, il en reste ... 13 (ou j'ai bien écrit : TREIZE)
Au niveau national, on part de 12864 jeunes ... en il en reste 343 !
> Une voile des adultes, (principalement quillards), avec dans les régatiers un panel varié de profils, qui vont de "l'ancien champion" qui résiste (souvent bien) avec ses acquis de jeunesse, des amateurs qui ont régaté avec plus ou moins d'assiduité dans leur vie, et des nouveaux qui se prennent au jeu.
Dans ce contexte, le débat monotype vs intersérie, grosse régate vs petites régate , n'a plus lieu d'être, et surtout pas pour essayer de hiérarchiser les niveaux (souvent pour insinuer que la grosse régate monotype est d'un meilleur niveau que la petite intersérie.
Petite régate vs Gros rassemblement :
Aujourd'hui , une régate de club type 5C, comme celle du CV St Quentin en Laser avec 30 bateaux aura un niveau largement supérieur à beaucoup de rassemblements annuels de grade 4 (de classe ou intersérie).
Aujourd'hui il n'y a plus de sélection pour un national, un européen, ou même un mondial (sauf exception).
Participer à ces régates n'est absolument pas synonyme de bon niveau (il faut juste avoir le temps et l'argent).
Intersérie vs Classe
Là aussi, le niveau de certains évènements en Intersérie est largement supérieur à celui de rassemblement monotype.
Sur un France ou un Open IND, ont peut retrouver les meilleurs de chaque classe, pas facile de bien se classer quand tu as , Boite en 5O5, Puissant en Jet, Meillat en Ponant, Boime en 470, Collin, Lebas ou Alleaume en Fireball etc etc ...
Très souvent les séries (hors jeune) n'ont plus le volume pour organiser des régates monotypes d'envergure.
Même si on prend un national 5O5, sur les 10 premiers ... il y a 3 Français. Au sein des français, il sera souvent plus facile de bien figurer, que sur un France IND où tu vas retrouver les meilleurs de chaque classe.
Support pointu ?
Là aussi difficile de faire une quelconque corrélation entre support pointu et niveau (çà serait même plutôt le contraire).
J'achète un D-One en 2014, et termine 4eme Français au Der, pour ma première "grosse" régate au sein de "support pointus" , surtoilés et de rating d'avion de chasse ... (idem Marie à Sanguinet l'année dernière) ... essaye donc de faire çà en Laser Master (sur un support qui n'est pas vraiment réputé pointu ...).
La même année, le firebaliste Ludovic Collin emprunte un RS400 pour Carnac ... et gagne l'épreuve.
Et quand deux Fireball débarquent toujours à Carnac sur le trophé Breiskiff en 2017, ils font 2 et 3.
Naviguer sur un support pointu est plus souvent une question de porte-feuille (et d'égo), que de niveau voile.
Et 90% n'arrivent pas à en tirer la quintessence (c'était mon cas en B14
).
Je rejoins donc ton propos sur la diversité, et la nécessité de proposer une offre diverse pour que chacun trouve "sa voile".
C'est pour cela que je me bats contre ceux qui ont une vision de "leur voile" en concurrence, en opposition ou en exclusion à d'autres pratiques.
On a souffert pendant des années de la concurrence et du sectarisme de certaines classes, et ce replis sur soi est toujours prompt à revenir soit à travers certains dirigeants de classes, ou d'autres formes d'organisations.
Le replis identitaire, ou tribal, est sclérosant, empêche les échanges, le recrutement (donc in fine abaisse à la fois le niveau, et le volume).
Et même pour ceux qui survivent ... si c'est pour le faire sur les cadavres des autres séries
... çà n'est en tout cas pas ma vision du sport.
C'est ce que tu appelles je crois la culture du "et", par opposition à celle du "ou bien / ou bien" ... que je partage